
L'inachèvement devient une empreinte
Israel Tanzondo
12/5/20252 min read


Il y a dans ce portrait, une douceur contenue.
Une image qui ne s’impose pas, mais s’avance à pas feutrés, comme un souffle ancien venu caresser le présent. Le visage, yeux clos, s’offre à nous sans défi, sans regard à soutenir.
Tout ceci témoigne d'un instant révolu qui réfute son effacement. Un passé qui ne s’imprime pas dans la netteté d’un cliché, mais dans la matière sensible d’un trait graphique , dans la lenteur d’un fusain, dans les silences laissés entre les hachures.
Dessiner, c’est avant tout engager la main dans une danse silencieuse avec le temps. Cette main n’est pas un simple instrument : elle est un prolongement du corps, un écho sensible de l’esprit qui, par ses hésitations et ses retours, inscrit sur le papier la trace palpable de l’invisible. Elle se souvient autant qu’elle crée, elle révèle autant qu’elle interprète.
Car toute représentation est toujours interprétation : même dans le réalisme le plus accru, le regard de l’artiste filtre le monde, le transforme, le fait surgir différemment. Le dessin réaliste n’est donc pas reproduction, mais réinvention poétique du visible.
Ainsi, l’inachèvement ne signifie pas ici un manque, mais au contraire une ouverture vers ce qui l'insaisissable . Le dessin laisse volontairement dans l’ombre certaines parties, comme pour laisser respirer l’image. C’est précisément dans cette part non dite, dans ce vide habité, que l’absence devient présence vivante. L’œuvre inachevée n’est pas figée, elle respire, elle tremble doucement, accueillant nos propres souvenirs.




Le visage dessiné n’est pas un simple reflet d’une identité : il est le lieu sensible d’une rencontre, un appel silencieux adressé à l’autre. Yeux clos, lèvres entrouvertes, il parle sans mots, exprime sans énoncer, devenant ainsi présence en retrait, chargée d’une profondeur intime. Dans cette démarche, l’iconicité dépasse la simple ressemblance. Elle devient un frémissement sensible du réel, une évocation subtile plutôt qu’une imitation directe. L’image ne prouve rien, elle témoigne, elle murmure ce que les mots peinent à dire.
Le dessin, ressuscite finalement par la chorégraphie de la main , ce que la photographie a enseveli .